Javotte

 

 

 

Ballet en un acte et trois tableaux, argument de Joseph Léopold Marie Louis CROZE (Viviers, Ardèche, 23 août 1869* Paris 9e, 05 septembre 1955*), musique de Camille SAINT-SAËNS.

 

   partition ; manuscrit

 

 

                        

 

à g. Camille Saint-Saëns en 1899 [photo Reutlinger] ; à dr. J.-L. Croze

 

 

Création au Grand Théâtre de Lyon le 03 décembre 1896.

 

 

Première à l'Opéra-Comique (3e salle Favart) le 23 octobre 1899. Chorégraphie de Mariquita.

31 représentations à l’Opéra-Comique au 31 décembre 1950, dont 15 en 1899.

 

 

Première au Théâtre de l'Opéra (Palais Garnier) le 05 février 1909. Décors d'Amable. Costumes de Pinchon. Chorégraphie de Léo Staats.

Gala du 19 décembre 1915 en l'honneur de Camille Saint-Saëns (32e représentation).

Reprise du 14 octobre 1935 (33e représentation) à l’occasion du centenaire de Camille Saint-Saëns. Chorégraphie d'Albert Aveline.

44 représentations à l’Opéra au 31 décembre 1961.

 

 

 

personnages

Opéra-Comique

23 octobre 1899

(1re)

Opéra de Paris

05 février 1909

(1re)

Opéra de Paris

05 janvier 1910

 

Opéra de Paris

19 décembre 1915

(32e)

Opéra de Paris

14 octobre 1935

(33e)

Opéra de Paris

09 novembre 1935

 

Opéra de Paris

13 août 1936

[1er acte seul]

Javotte Mmes Edéa SANTORI Mmes Carlotta ZAMBELLI Mmes Carlotta ZAMBELLI Mmes Carlotta ZAMBELLI Mmes Suzanne LORCIA Mmes Suzanne LORCIA Mmes Suzanne LORCIA
Hélène, sa mère Fanny GÉNAT Berthe SIRÈDE Berthe SIRÈDE Berthe SIRÈDE Olga SOUTZO Olga SOUTZO Olga SOUTZO
Petit-Pierre WUILLAUME            
la Bressane RAT            
une Paysanne Germaine DUGUÉ            
la Femme du Seigneur   Marthe URBAN          

Concurrentes

 

Jeanne DELSAUX

Georgette COUAT

Anna JOHNSSON

Georgette COUAT

Anna JOHNSSON

Marthe URBAN

 

Jacqueline SIMONI

HUGHETTI

Odette BARBAN

Marie-Louise DIDION

Jacqueline SIMONI

HUGHETTI

Odette BARBAN

Marie-Louise DIDION

 
Jean, amoureux de Javotte Jeanne CHASLES MM. Léo STAATS MM. Albert AVELINE MM. Albert AVELINE MM. Serge PERETTI MM. Serge PERETTI MM. Serge PERETTI
Brisquet, garde champêtre MM. FEREMBACH C. BERGÉ C. BERGÉ   Louis LEBERCHER Louis LEBERCHER LEGRAND
le Père François, père de Javotte PRICE père Félix GIRODIER Félix GIRODIER Léo STAATS FÉROUELLE FÉROUELLE FÉROUELLE
le Seigneur GOURDON Charles JAVON Charles JAVON HUMBERT      
le Maire ÉLOI            

les deux Adjoints

Etienne TROY

LACROIX

           

trois Jeunes Gens

 

Albert AVELINE

Georges CLÉRET

Gustave RICAUX

Georges CLÉRET

Gustave RICAUX

Marcel MILHET

       
l'Appariteur   FÉROUELLE FÉROUELLE        
le Chef de musique         Nicolas EFIMOFF Nicolas EFIMOFF  
Danseurs et Danseuses, Paysans et Paysannes     Mlles De Moreira, H. Laugier, Cochin, Schwarz, B. Marie, Dockès, Guillemin, Brémont, Mouret, M. Lequien, B. Mante, S. Mante, S. Kubler, J. Laugier, Soutzo, Poncet, Jeanne Delsaux  

 

Mlles Binois, Lopez, Dynalix, Kergrist, Sertelon, Decarli, Grimberg, Guillot, Janine, Chauviré

MM. Serry, Legrand, Ritz, Duprez, Sauvageau, Ponti, Domansky, Pelletier

 
Chef d'orchestre Alexandre LUIGINI Paul VIDAL M. Paul VIDAL Henri BÜSSER Henri BÜSSER Henri BÜSSER Henri BÜSSER

La scène se passe dans le Nivernais.

 

 

le 1er tableau lors de la première à l'Opéra-Comique [photo Mairet]

 

 

 

[la première à l'Opéra-Comique]

 

Après Ascanio, on disait à M. Camille Saint-Saëns, comme on lui avait dit après Etienne Marcel et Henry VIII :

« Pourquoi n'écrivez-vous pas, en dehors des divertissements si réussis, si curieux de vos ouvrages, un ballet entier et complet ? Vous y auriez la main comme personne ! »

En 1895, l'auteur de Samson et Dalila, excédé par cette question, y voulut répondre : il chargea un jeune ami du poète Louis Gallet de lui trouver un sujet à danser. Deux scénarios furent échangés sans résultat entre le maître et son nouveau collaborateur. Bientôt on entendit parler d'un Aliboron pour les Folies-Marigny rouvertes, vite refermées. Les directeurs de la Monnaie de Bruxelles, MM. Stoumon et Calabrési, friands d'une aubaine pareille : un ballet inédit de Saint-Saëns, accoururent à Paris pour essayer d'attacher Aliboron à la fortune de leur
théâtre...

Au mois de mars 1896, après avoir été baptisée Javotte par M. Auguste Durand, l'éditeur et l'ami de M. Camille Saint­-Saëns, une pièce définitive fut adoptée. Le manuscrit fut expédié au compositeur à Genève. Voici l'accusé de réception des trois tableaux, conçus dans la formule simple et naïve réclamée par le compositeur : « Je suis arrivé hier, votre scénario m'arrive aujourd'hui. Il tombe à pic. Je l'ai lu... Si je fais quelques modifications de détail au cours de mon travail, je vous en aviserai... Oh ! ce ballet, comme ça va être amusant ! »

Des nouvelles fréquentes parvenaient sur la marche du travail. M. Camille Saint-Saëns écrivait au correspondant intéressé en juillet 1896 :

« J'en suis à la petite marche narquoise du défilé devant le garde champêtre et le père muni de sa lanterne. Et je n'ai pas encore pu essayer au piano une seule note de ce dernier tableau qui est aux trois quarts fait. Mais cela n'a pas d'importance ! »

Terminée et orchestrée à Saint-Germain-en-Laye, Javotte fut créée à Lyon le 4 décembre 1896, sous la direction de M. Albert Vizentini, qui devait retrouver l'ouvrage à l'Opéra-Comique. Huit ou dix jours après seulement, la Monnaie, à qui était destinée la primeur du ballet, faisait connaître aux Bruxellois cette exquise partition qu'ont entendue, avant Paris : Toulouse, Marseille, Rouen, Royan, Angers, Milan et Barcelone.

 

***

 

Le ballet de M. Camille Saint-Saëns continuait à danser et à plaire en province et à l'étranger, quand M. A. Carré, nommé directeur de l'Opéra-Comique, fit signe à la petite Nivernaise. Elle vint à Paris, joyeuse de toute la joie de ses parrains, et entra en danse... de répétition !... Javotte devait servir de nouveaux débuts parisiens à Mademoiselle Carlotta Brianza, jadis applaudie à l'Eden, montée depuis en astre de première grandeur au ciel chorégraphique de la Scala de Milan. Madame Mariquita, avec sa flamme, son art et son habileté, réglait déjà les ensembles. Soudain, Mademoiselle Brianza tombait malade. On chercha une Javotte, on en essaya plusieurs, il y eut des examens.

Un matin, l'aréopage constitué par MM. Camille Saint-Saëns, Albert Carré, Vizentini et Madame Mariquita, réuni au théâtre de la République, refuge momentané de l'Opéra-Comique, non installé, attendit plus d'une heure una prima ballerina assoluta, qui avait dit pouvoir remplacer la Brianza. Las de poser, le jury allait se retirer quand l'étoile apparut. Habillée et priée de montrer son talent, elle refusa, alléguant qu'elle était connue, qu'à Londres on l'avait fêtée, etc. Ce jour-là, on n'examina pas plus loin. Et l'étoile de première... prétention regagna son fiacre où elle reprit, sous la forme d'un élégant cavalier, un satellite. Tous deux s'éclipsèrent... !

Javotte, ayant trouvé en Mesdemoiselles Chasles, Santori, Fanny Génat, Rat, Germaine Dugué, André, Willaume et MM. Price, Ferrembach, Gourdon, Troy, Éloi, Lacroix des interprètes parfaits, a été donnée avec le succès que l'on sait, salle Favart. Toujours aussi goûté du public — il faut bien, sans trop de modestie, le constater — le ballet poursuit sa carrière. Même avec la partition si fine, si colorée, exubérante et légère de M. Camille Saint-Saëns, en eut-il été ainsi sans la science, le dévouement, l'ingéniosité, l'art de faire vivant et joli en même temps, qu'ont déployés, dans la mise en scène et la chorégraphie, M. Albert Carré et Madame Mariquita, sans le talent si frais, si délicat, si ingénument espiègle de Mademoiselle Santori, sans la virtuosité incomparable qu'a déployée Mademoiselle Jeanne Chasles, mime et ballerine hors pair, toujours travaillant, toujours en progrès, toujours fêtée ?

Faisant au collaborateur de M. Camille Saint-Saëns un honneur exagéré, des critiques se sont arrêtés à discuter son livret. Peine bien inutile ! Ils auraient dû, ces Aristarques, désarmer devant la pauvreté naïve, voulue, exigée de l'intrigue, se laisser prendre au charme seul de la musique et de la danse. Théophile Gautier, le poète de Giselle, ne disait-il pas, à propos de la Vivandière, où brilla Fanny Cerrito en octobre 1848 :

« Si le pied de la danseuse est petit, bien cambré et retombe sur sa pointe comme une flèche, si la jambe voluptueusement s'agite dans le brouillard des mousselines, si le sourire éclate pareil à une rose pleine de perles, le sujet peut n'avoir ni queue, ni milieu, ni tête : le vrai, l'éternel sujet du ballet, c'est la danse. » Sans doute, l'esthétique chorégraphique n'est pas là tout entière, tant s'en faut, mais la boutade a du vrai : je la dédie principalement aux critiques célibataires, sans chercher à excuser par sa citation le scénario simpliste de Javotte.

 

(J.-L. Croze, le Théatre n°28, février 1900)

 

 

 

 

 

le 3e tableau lors de la première à l'Opéra-Comique [photo Mairet]

 

 

 

Le charmant ballet dont le maître Saint-Saëns écrivit la musique sur le livret de M. J.-L. Croze, fut joué pour la première fois en 1896, sur la scène du Grand-Théâtre de Lyon. En 1899, Javotte s'inscrivait au répertoire de l'Opéra-Comique de Paris où elle obtenait un brillant succès.

Cette partition ravissante de jeunesse, écrite dans le style le plus simplement aimable, ne pouvait que faire merveille sur la scène de notre Académie nationale de musique et de danse. Elle vient d'y être montée d'ailleurs avec infiniment de goût et interprétée le mieux du monde. Le talent si spirituel de Mlle Zambelli, son interprétation intelligente et expressive ont paré le rôle de Javotte de toutes les grâces et de toutes les séductions. Auprès de l'étoile, on a vivement applaudi Mlles Sirède, Delsaux et les trois concurrentes Mlles Couat, Urban et Johnsson, ainsi que MM. Staats, Girodier, Aveline, etc...

De jolis décors encadraient l' œuvre de MM. J.-L. Croze et Saint-Saëns au succès de laquelle a collaboré l'orchestre de l'Opéra, habilement dirigé par M. Paul Vidal.

 

(Comœdia illustré, février 1909)

 

 

 

 

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